dimanche 29 août 2021

Coucou jeune verdier d'Europe et petits rougequeues !

Verdier d'Europe juvénile (16/08/2021)
Le 16 août, mon regard est attiré par un joli oiseau venu se poser sur le mirabellier en face de ma fenêtre de bureau.
J'ai tout de suite flashé sur le jaune qui se dégageait de sa couleur d'ensemble... Heureusement que l'appareil photo habite pratiquement à côté de ma souris de PC ! J'ai vite pu saisir ce moment.
 

Confirmation : il s'agit d'un verdier d'Europe juvénile (chloris chloris, European Greenfinch), très craquant avec ses petites plumes ébouriffées. Il n'est à ce stade pas aussi jaune que l'adulte, et son plumage est strié sur le ventre et le dos.

C'est un oiseau commun mais hélas dont l'espèce est en déclin en France, comme le chardonneret. 

 

Rougequeue noir juvénile (19/08/2021)
 

Parmi mes autres petits visiteurs de télétravail, je dois signaler depuis trois semaines une famille de rougequeue noir, maman, papa et leurs oisillons, qui viennent picorer les petites baies des arbustes. Il s'agit sûrement de la même famille qui fréquente assidûment le jardin depuis le mois de juin.

Je reconnais aisément
les rougequeues (Phoenicurus ochruros) dès qu'ils se posent sur mon mirabellier, pas seulement grâce à la couleur orangée de leur queue (rectrices externes) mais aussi parce qu'ils remuent fréquemment la queue de manière verticale, ce qui leur est caractéristique.

--> les autres oiseaux de mon jardin

mardi 17 août 2021

Caroline Deyns : "Trencadis", une pépite sur Niki de Saint-Phalle

Autoportrait (zoom)
Caroline Deyns a écrit une
Pink Nude in Landscape 1959 (zoom)
biographie romancée
de l'artiste Niki de Saint Phalle. Et le résultat est aussi passionnant qu'impressionnant. (Ed. Quidam Editeur, 2020, 354 p.)

Pour quelqu'un qui comme moi adore Niki de Saint Phalle et a eu l'occasion de savourer goulûment ses œuvres lors de la magnifique expo au Grand Palais en 2015 (cf. photos), ce roman est une pépite.

Car si l'on connaît l'histoire de Niki :
... sa jeunesse de bonne famille à New-York, l'enfance pétrifiée par l'inceste commis par son père, ses accès de mélancolie, ses débuts de mannequin, son premier mariage, le "renoncement" à ses enfants, ses internements en clinique psychiatrique et son apaisement par le dessin ou la peinture, puis sa découverte de l'univers de Gaudi au Parc Güell, les "trencadis" (mosaïques en catalan), la rencontre avec Jean Tinguely, les "tirs" à la carabine, cathartiques, la vie à deux, les sculptures, les mosaïques, les douleurs physiques liées à son art, les infidélités de Jean, la souffrance psychique, le deuxième mariage (avec Jean), le Jardin des Tarots, la Californie...

Donc, si l'on connaît déjà les grandes lignes de la vie de Niki de Saint Phalle, on ne saurait imaginer son quotidien. 

" J'ai eu la chance de rencontrer l'art parce que j'avais, sur le plan psychologique, tout ce qu'il faut pour devenir une terroriste."

Et c'est ce que comble Caroline Deyns, avec un talent de conteuse exceptionnel, qui passe par un souci du détail inouï : 

  • Le ballet des Nanas (scénographie envoûtante de l'expo)
    la façon dont Niki enfant ou ado est contrainte d'accompagner sa mère en visite auprès de ses amies de la bonne société new-yorkaise, s'ennuyant à mourir sur sa chaise... ou le regard soudain hypnotisé par la collection d’œufs de Fabergé de la mondaine insipide qui sert d'amie à sa mère...
  • Comment jeune mère, elle pèle à n'en plus finir une pomme...
  • Quand elle commence à collecter les instruments tranchants sous son lit...
  • Quand elle invite l'artisan forain à utiliser sa carabine pour une séance de ses bientôt fameux "tirs" : 

"(...) j'ai tiré. Du sang vert a jailli en gerbes molles. Ébahi, je l'ai interrogée du regard. Elle a éclaté de rire. Ce rire... Je m'en souviendrai toute ma vie, parce qu'il avait beau être aussi juvénile que sa silhouette, on le sentait quelque part creusé de sécheresses, comme des écailles de serpent. (...) Derrière le plâtre, Andréas, il y a des poches dissimulées, des poches avec de la peinture, et puis plein d'autres choses, des tomates, du café, du shampoing, des œufs, des spaghettis. voilà vous savez, maintenant tires encore, Go on ! J'ai obéi et du pus bleu a coulé de l’abcès blanc. C'était magnifique, c'était horrible (...)."

  • Ou que, femme mûre, elle attend désespérément Jean au restaurant le soir d'un de ses vernissages, et il arrive au bras de sa maîtresse...
  • Quand elle sombre dans la dépression... 

"Mais là aussi la vie a repris. Elle entent, elle voit : les piailleries des oiseaux et le jour qui force les stores. Le monde voudrait la lever à grands coups de pieds au cul qu'il ne s'y prendrait pas autrement. Se lever ? Elle referme les yeux pour dessiner mentalement les couleurs du corps posé sur le matelas, du corps à mouvoir. Son corps. (...) Se lever. La belle affaire."

La fontaine Stravinsky (Tinguely / Saint-Phalle, 1983)
à Paris/Beaubourg, avec en arrière-plan
la fresque "
Chuuuttt !!!" peinte par Jef Aerosol en 2011
 

Caroline Deyns imagine ainsi chaque pan de la vie de Niki, déroule ses crises de mélancolie ou ses accès de créativité, ses pensées, ses douleurs ("Oui j,ai mal, affreusement à me faire hurler toutes les nuits (...)", ses cataplasmes, le souvenir d'abord refoulé puis devenu béant des actes que son père commet sur l'enfant de onze ans qu'elle était, son amour pour un homme volage... Le lecteur vit en miroir la vie de cette femme libre, douée, artiste, blessée, résiliente, indépendante et aimante - ou amante.

Comme elle l'écrit dans les remerciements à la fin de son livre, l'auteure évoque son "double romanesque". Comme le dit Libé : "Blessée mais toujours debout".
Un roman vraiment incontournable pour qui admire cette incroyable artiste, la mère des Nanas. Mais attention, l'écriture de Caroline Deyns est extrêmement foisonnante, voire fourmillante, il m'a fallu un petit temps d’adaptation pour accepter de me laisser submerger et savourer.

Male Gaze : Des femmes remarquables cernées de zizis en pâte de verre

Non ce n'est pas un Muppet 😁
Tout à fait par hasard (oui oui ;-)), à l'occasion d'un petit daytrip à Chartres pour enfin découvrir la cathédrale et la Maison Picassiette, je suis passée devant une petite expo sise dans une chapelle, la chapelle Saint-Éman.
Ni une ni deux, par l'art alléchée je me rue à l'intérieur (moins vite qu'à mon habitude, pass sanit' oblige) sans même regarder l'objet de l'expo, et la première chose que j'aperçois, c'est une magnifique sculpture en verre, dans les couleurs que je vénère, violet, pourpre, vert anis... 
On dirait un bonhomme tout en longueur qui accueille sympathiquement les visiteurs, je ne sais pas pourquoi cela m'a (de loin) fait penser à une marionnette du Muppets Show. J'admets avoir parfois beaucoup d'imagination.
 
Puis avec un léger recul, ouah ! je réalise que cette sculpture si délicate et onirique représente un zizi et ses deux acolytes 😄 !

Renseignements, très succincts, pris à l'accueil, il s'agit d'une expo de la mosaïste italienne Dusciana BRAVURA née à Venise en 1969, qui vit et travaille entre Ravenne et Venise...

Pas de petite plaquette explicative de l'expo, sinon un extrait du programme culturel de la ville de Chartres qui présente en quelques lignes cette exposition intitulée « Prénom Vénus », montrant "un bestiaire digne d'une fable médiévale qui prend vie en tatous, tortues, caméléons et lézards émeraude (...) semblant tout droit sortis d'un conte de Perrault."
Euh... mais ouf, je suis tout de même rassurée d'avoir identifié un Muppet Show dans ce bestiaire, mais pour dire vrai, à part des zizis raffinés, je n'ai pas aperçu ou su identifier tatous, tortues ou autres animaux. Je me demande si le programme culturel officiel n'aurait pas pêché par excès de pruderie. Ou bien erreur de thème !
Sur Internet, un peu plus de précisions :
Dusciana Bravura interroge l’influence de la société patriarcale sur la vision que les femmes ont d’elles-mêmes et que la société a des femmes. « Le regard dominant n’est pas seulement masculin dans les médias, mais conditionne les actions, les relations, les modes de vie ». Et si on changeait d’approche ! Comment se positionner sur une vision de grands personnages de la société du point de vue d’un regard féminin ? Par ses sculptures « Male gaze » (vision masculine dominante) Dusciana nous interpelle sur la représentation contemporaine des standards masculins.
Ainsi, le Male Gaze est illustré par les (magnifiques) sculptures de zizis en verre et murine de Murano qui trônent sur des piédestals au milieu de l'espace, dardant leur "regard" vers des portraits de femmes.
D. Bravura a réalisé ces portraits via une  technique d’impression numérique sur toile velours. Chaque portrait est accompagné de quelques lignes mettant en exergue le caractère remarquable de ces femmes "que l’histoire a souvent oubliées"
Parmi celles-ci :
  • Ada Lovelace (premier programmeur informatique)
  • Greta Thunberg et son intervention à la COP24 sur l'urgence climatique
  • Heddy Lammarr (actrice et co-inventrice d'un système de guidage à distance des torpilles)
  • Marylin Monroe qui a permis à Ella Fitzgerald de se produire sur la scène d'un club qui la discriminait
  • Emmeline Pankhurst, leader du mouvement des suffragettes au Royaume-Uni
  • Stéphanie Frappart, 1e femme arbitre internationale de foot en 2021
  • Gerda Lenner, écrivaine et historienne
  • Andrée Geulen Herscovici, enseignante belge, Juste parmi les Nations
  • Zitkala-Sa, Oiseau Rouge, première compositrice d'un opéra amérindien (sioux)
  • Creole Katherine Johnson, scientifique qui a calculé la trajectoire du 1er Américain dans l’espace et d'Apollon II vers la Lune en 1969
  • Rosalind Franklin, chimiste ayant contribué à la structure moléculaire de l'ADN
  • Lise Meitner, scientifique, travaux sur la fission nucléaire
et d'autres portraits encore, que je n'ai malheureusement pu tous relever... car le mari trépignait pour aller voir la cathédrale !

Le Male Gaze à la chapelle Saint-Eman, comme un parc d'ogives nucléaires
 
A noter que cette expo fort intéressante est présentée dans une chapelle. 😉

samedi 14 août 2021

Mirion Malle : « C’est comme ça que je disparais », une BD sensible sur la dépression

C'est une petite BD d'une dessinatrice française vivant à Montréal, née en 1992. La très belle couverture m'a tout de suite happée, ainsi que le titre, si surprenant "C'est comme ça que je disparais".

Mirion Malle a connu la dépression. Elle indique dans une interview que le déclic pour écrire sur le sujet lui est venu en voyant une émission où un chanteur québécois (Hubert Lenoir), avouant que parfois il n’avait pas le goût de vivre, a créé la stupeur sur le plateau et le sujet fut vite clos. On ne doit pas évoquer ces choses-là, non mais... 

Alors Mirion Malle a mis en dessin l'histoire de Clara, jeune attachée de presse loin de s’épanouir dans son job, et qui a récemment rompu avec son amie, tout en étant hantée par une relation traumatique vécue plusieurs années auparavant avec un garçon. 

Petit à petit, on voit Clara se refermer comme une huître dans son petit appartement, après avoir en vain tenté de se faire aider par une psychiatre elle-même on ne peut plus fermée... Clara se ferme à ses amis, ses collègues, et ne finit plus que par "dialoguer" avec son téléphone et scruter les réseaux sociaux,  s'enfonçant davantage chaque jour dans la dépression.

"Je suis vide, je ne ressens rien, juste du vide."
"Je ne sais pas ce qui m'arrive. Je suis toute seule ! Personne sait ! J'en peux plus. J'y arrive plus."

 

 "Au secours."
La planche suivante est d'une force inouïe.
Dans le refuge qu'est devenu son lit, Clara navigue sur son téléphone et retombe sur une note qu'elle avait préparée pour ses proches au cas où elle disparaîtrait. Puis elle se prend la tête dans les mains, et l'on perçoit Le cri d’Edgard Munch qui la submerge.
Elle n'a plus que son lit pour refuge ultime, elle s'enfouit sous sa couette et susurre, seule, "Au secours".

 

Le salut finira par venir de la sororité.

Sortie karaoké, virée au chalet, recherche d'un nouveau thérapeute (témoignage effarant sur le parcours du combattant et les coûts de prise en charge...)... Mirion Malle déroule la chute libre de la jeune fille qui a perdu le goût de vivre, et sa lente reprise. 

La dernière planche est magnifique.

Le graphisme est sobre, en noir et blanc, tout en étant très expressif.
D'aucuns ont regretté la simplicité des dessins, mais cela ne m'a pas gênée. (Ed. La ville brûle, 2020)

 

APARTÉ SUR LE MAL DE VIVRE DU CHANTEUR DE BOSTON...

Je ne sais plus trop comment de fil en aiguille je suis tombée il y a peu sur les quelques mots d'adieu écrits par le chanteur de BOSTON, Brad Delp, qui s'est suicidé le 9 mars 2007 à 55 ans. Il explique, dans ces mots qu'il avait éparpillés dans la maison, avoir perdu son désir de vivre (la première phrase est écrite en français) :

"J’ai une ame solitaire. I am a lonely soul."
“To whoever finds this I have hopefully committed suicide. Plan B was to asphyxiate myself in my car.”
“I take complete and sole responsibility for my present situation. I have lost my desire to live.”

Cette fin m'a très touchée. Fabuleux More than a feeling qui a habité ma jeunesse...
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