samedi 12 janvier 2013

Didier Decoin : "Je vois des jardins partout"

***** Réf. géographique : France, R-U... (2012) - Genre : Eloge du jardin (mais pas du jardinage !)

Didier Decoin est un auteur que je n'avais pas "croisé" depuis des années... depuis mon adolescence quand je dévorais John L'Enfer (1977), Abraham de Brooklyn (1971), Un policeman (1975), Laurence (1969)... Des livres "à tomber" que je n'ai pas relus depuis certes, mais je les ai toujours dans ma bibliothèque. Pour un jour, les redécouvrir.

Mon cher Didier Decoin (au demeurant fils du fameux cinéaste Henri D...) m'a fait l'heureuse surprise de dévoiler sa passion pour les jardins dans un petit livre sympathique et bourré d'anecdotes.
De la grande littérature de l'élu de l'académie Goncourt : point... mais de l'humour et de la simplicité : oh que oui !
Même si le début du livre m'a paru un tantinet longuet, la suite, je l'ai avalée en me projetant visuellement dans toutes les descriptions de fleurs et jardins de l'auteur.
Morceaux choisis en vrac de ce livre court mais "botanicoptimiste" :
- Bien aimé l'anecdote sur les graines de palmier qui ont donné naissance au bout de 2 ans à une virgule devenue après 7 années de soins, espoir et cajoleries (et fierté !) un palmito de 13 cm... qui mourut soudain au grand désespoir de son mentor, désespoir que je comprends pleinement. (Je suis moi-même en phase d'expérimentation ès palmiers depuis une éternité...)
- La théorie du rhizome :
"Carl Jung avait raison de comparer l’existence humaine "à une plante qui vit de son rhizome. La vraie vie de cette plante est invisible, cachée dans son rhizome. La partie qui émerge au-dessus du sol ne dure qu’un seul été. Après cette apparition éphémère, elle se fane. Ce que nous percevons de la vie, c’est l’éclosion, la floraison, puis cela disparaît. Mais le rhizome, lui, perdure." Un jardin n’est-il pas lui aussi un rhizome ? Une part immense de son territoire échappe à nos regards, nous dissimule ce qui s’y passe vraiment.
(…) Pourtant, sous la terre, le jardin progresse. Chaque saison, sans que cela m’apparaisse, mes amis les rhizomes, ceux des iris, des bégonias, des euphorbes, du muguet, des fougères – mais aussi du chiendent, conquièrent de nouveaux territoires souterrains."

- Toujours à propos de rhizomes... Didier Decoin ne manque pas de révéler la recette de la caipirina qu'il a goûtée auprès d'un serveur expert de Rio : toute la différence repose sur le citron macéré pendant une heure dans du gingembre pilé... (NB : gingembre = rhizome)

- Didier Decoin raconte comment, enfant, il créait des jardins hydrophiles : plantant des graines dans le coton démaquillant chipé à sa mère, s’extasiant "devant un foisonnement de petites plantules d’un vert tendre", il enfonçait des crayons de couleur pour figurer des buissons et éparpillait des boutons colorés en guise de massifs de fleurs.

- Compte rendu de ses voyages botaniques en Grande-Bretagne, accompagné de son épouse et des amis du Club de la 5e saison… l’occasion de nous conter l’histoire du jardin dans le ciel : les 23 amis amoureux de la botanique rapportant chacun des potées et sacs de plantes en bagage cabine, l’hôtesse de la British Airways prit sur elle d’entreposer tous les végétaux dans la cabine de 1e classe libre, et d’attacher les plantes sur les sièges avec les ceintures de sécurité.
A cet égard, je puis moi-même témoigner de cette folie de bagages végétaux : où que je sois allée dans le monde, je n'ai manqué de revenir avec boutures (conservées idéalement enrobées de kleenex humides à l'intérieur de rouleaux vides de sopalin ou encore mieux de contenants vides de chips style pringles que j'emporte toujours au cas où...).

- Anecdote du cucumis fugex : le concombre fugitif, soi-disant un concombre apparaissant furtivement à un endroit puis disparaissant…

- "Novembre : l’automne fut longtemps l’époque où il fallait fermer le jardin."

- "Surprises par l’objectif de Rachel Lévy, les fleurs en fanaison se parent de teintes violettes (…). A cet égard, l’agonie des iris, et notamment de l’iris germanica, offre la plus extravagante, la plus riche, la plus folle des palettes. Rachel Lévy prouve que la fleur qui dépérit, est capable de textures et de coloris plus complexes et surtout plus émouvants, que la même fleur dans la gloire un peu arrogante de sa jeunesse."

- Une citation qui colle tellement à mes pérégrinations au jardin :
"Avec ses 1001 métamorphoses dans l’instant (une abeille qui s’enfouit en frissonnant au fond d’un doigt de digitale, une goutte de pluie qui se détache du velu gris-vert d’une feuille de sauge, le vent d’ouest qui incline la tête blanche d’une viorne de Carles vers les grappes rose tendre d’un lilas des Indes – flirt outrancier de viburnum carlesii avec lagerstroamia indica – mais que font donc les paparazzi ?...) comme dans la durée, le jardin est devenu pour moi illustration d’éternité."

--> Voir aussi ma chronique "jardin"

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