dimanche 29 juin 2014

Marie Laurencin, exquises peintures

Affiche de l'expo devant le Musée Marmottan
Marie Laurencin (1883-1954), peintre français

Je ne connaissais cette artiste que par la chanson de Joe Dassin (L'été indien) :

"Avec ta robe longue tu ressemblais
A une aquarelle de Marie Laurencin
Et je me souviens, je me souviens très bien
De ce que je t'ai dit ce matin-là
Il y a un an, y a un siècle, y a une éternité". 


Puis, les affiches de l'expo qui lui était consacrée en 2013 au Musée Marmottan, habillant tout un couloir du métro, m'avaient émerveillée.

L’ouvrage incontournable de José Pierre sur Marie Laurencin (Ed. Somogy, 1988) m’a fort heureusement accompagnée à l’expo. 
Ses commentaires et explications sont très intéressants (parfois impertinents !), et l’ouvrage comporte des repères biographiques et chronologiques précieux.

José Pierre décrit Marie Laurencin comme peintre non seulement de la femme, mais de la féminité. Les seuls hommes qu’elle a peints sont poètes (Apollinaire, André Salmon, Cocteau, Somerset Maugham…) et non pas mondains.
Il met en avant « sa touche molle et caressante », si caractéristique de ses tableaux.

Il décrit la simplification croissante de la composition : 

Les deux espagnoles (1915) - La liseuse (1913) - La prisonnière (1917)
(cartes postales achetées à l'expo)
Elle écarte les « animaux, fleurs, suggestions de paysage qui tendaient à envahir l’espace autour du personnage figuré à partir de 1924 au profit des compositions plus ou moins allégoriques de la même période. 
Bientôt le personnage réduit à sa seule présence se découpera sur un fond dépourvu de toute allusion figurative, un fond non pas uni mais en quelque sorte brouillé et comme animé de taches qui, si l’on faisait abstraction du modèle, annoncerait les peintures non figuratives (…). » 

Une très belle exposition au musée Marmottan, qui permit de voir nombre de tableaux conservés au Japon, où cette peintre est fort prisée.

En néophyte, ma préférence va aux tableaux de la période espagnole ou antérieure. 

J’ai moins apprécié les visages sans modelé, sans traits, sans nez, de sa période suivante.

Du rapport de Marie Laurencin au cubisme, José Pierre dit :

"C’est un cubisme « rococo » dont on pourrait parler à son propos, comme suffirait à le prouver le très charmant « Portrait de Nicole Groult », inscrit dans l’ovale adopté par braque et Picasso dès 1911 et où l’on remarque la présence du fameux lama."

Marie Laurencin : Coco Chanel - Mme G. Benard - Baronne Gourgaud -
Couverture du livre de J. Pierre - Cecilia de Madrazo - Jeunes Filles 

"Or ML adopte justement du cubisme des débuts, d’une part un trait ininterrompu, allusif, cursif même, qui ne se soucie ni de délimiter une surface comme l’arabesque gauguinienne ou matissienne, ni d’aider à suggérer un volume comme le voudrait la tradition cézanienne, d’autre part un chromatisme des plus discrets, réduit la plupart du temps à des « jus » très délayés dans la térébenthine."

"Parmi les peintures de 1913-1914 où l’on voit ML s’affranchir progressivement du joug cubiste, il y aurait "L’écharpe rose", "Deux Femmes au piano", "Les Deux sœurs au violoncelle", "La Fillette au chapeau bleu et noir" et "La Femme au bouledogue". Les éléments cubistes demeurent ici et là mais cessent de corseter le tableau, de l’emprisonner dans le réseau contraignant de structures préétablies. L’air, soudain, circule, le sang remonte soudain lentement aux pommettes des personnages, ce ne sont plus des spectres exsangues, mais à nouveau des petites filles, des jeunes filles, des femmes."

1919/1922 : l’élaboration d’un style
"ML se libère de son héritage cubiste d’avant la guerre (sauf ce petit flashback qu’elle s’autorise dans "Les Amazones" de 1921) et accumule en divers  sens des réussites aussi peu contestables que "Femmes à la colombe" /1919, "Femmes dans la forêt" / 1921, et aussi "Femme en noir", assises, voire "Princesse p…" / 1921, "Le Peintre et son modèle", "Symphonie" ou "Les Danseuses" et "La Visite"/1922, enfin "Scène champêtre" ou "La Promenade dans les bois", "Jeunes filles dans les bois" et "Femmes à la cage"."

"Parmi les peintures exécutées en 1921, l’année du retour à Paris : "La Femme au chien", qui appartient à Paul Morand, renchérit encore sur la grisaille floue de "la Femme au singe" et des "Femmes à la colombe" (ou Marie Laurencin et Nicole Groult) : l’image est au bord de la dissolution totale dans la brume et il n’est pas douteux d’ailleurs que ce soit de cette année-là qu’il faille dater l’effacement du nez dans les visages vus de face."

Marie Laurencin et les couleurs :

ML déclare en 1934 : "Je n’aimais pas toutes les couleurs. Alors pourquoi se servir de celles que je n’aimais pas ? Résolument, je les mis de côté. Ainsi, je n’employais que le bleu, le rouge et le vert, le blanc, le noir. En vieillissant, j’ai admis le jaune et le rouge."

1952, elle explique "les couleurs me terrifiaient. Elles devenaient si vite sales. Le rouge était mon ennemi. Je n’ai jamais pu employer le vermillon. Et toujours, jusqu’à maintenant, la volonté de le faire m’a manqué. Je l’ai remplacé par la laque de garance.
A propos de couleurs, avez-vous remarqué comment les savants, les grands travailleurs, aiment le bleu ? Cet amour du bleu est sympathique : les gens qui aiment le bleu sont toujours des gens très bien."
"Aujourd’hui, le rouge, le jaune et le vert prédominent dans mes tableaux, sur le noir, le bleu et le rose. C’est le résultat d’une lente, très lente évolution."

"( …) On constate que la couleur, limitée à de simples rehauts au cours de la période cubiste, elle prend de l’importance, petit à petit, à partir de 1915, devient onctueuse et suave vers 1923, règne en maîtresse à partir de 1926-27, quelquefois au détriment de la forme, tend à devenir plus éclatante dès le début des années 30 et davantage encore dans les douze dernières années ? Dès 1936, on trouve assez fréquemment utilisées dans le même tableau les trois couleurs primaires (l’artiste, elle parlait du rouge, du jaune et du vert)."
Un mur d'affiches de l'exposition transforme le triste couloir
du métro parisien en annexe de musée !

Les accessoires :
ML aura recours aux mêmes accessoires dans sa peinture pendant un demi-siècle : instruments de musique (piano, mandoline, guitare), éventails, miroir à main, rubans, fleurs.
"(…) Les rubans, fleurs dans les cheveux et divers accessoires ou le choix de tel ou tel dessin de tissu ne sont nullement appelés par l’anecdote et moins encore par la recherche de l’effet ou même du « joli », mais par des exigences structurelles."




D'année en année, je découvre des femmes peintres que je ne connaissais pas... Berthe Morisot, Eva Gonzalès, Mary Cassatt, Tamara de Lempicka... et Frida Kahlo que je connaissais mais dont je n'avais pas encore vu d'exposition consacrée avant celle de cette année au Musée du Luxembourg.

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