mardi 11 novembre 2014

Alaa El Aswany : "Automobile Club d'Egypte"


***** (Ed. Actes Sud, 2013, Trad. Gilles Gauthier, 542 p.)

Un très beau roman sur l’Egypte de la fin des années 40, encore sous tutelle britannique, alors que commencent à s'élever quelques voix pour davantage d'autonomie au peuple égyptien, voire certaines revendicatrices de ce que l'on n'ose encore nommer l'indépendance. Mais réprimées facilement faute de soutien conséquent à l'époque. Cependant, quelques années plus tard...

Certes, un souverain est en place, Farouk, mais qui rapidement n'a plus de fil conducteur que la débauche et le jeu, ce que seule lui permet la fréquentation de l'Automobile Club du Caire, et tant pis si ce sont les Britanniques qui tirent les rênes de cette débauche !

L’histoire est contée à plusieurs voix, celle de chacun des membres de la famille d'Abelaziz Hamam, ancien grand propriétaire à la campagne, contraint, ruiné, de rabattre sa famille au Caire dans des conditions précaires. Une voix par chapitre, et des sauts de chapitre qui entretiennent un vrai suspense puisque l'on laisse en l'état tel personnage confronté à un véritable dilemme et pouf changement de chapitre, il faut que le lecteur enchaîne sur les déboires de tel autre personnage et se souvienne de ce qui précède : bref, un procédé littéraire haletant, mais aussi exigeant.
On se trouve rapidement pris par le sérieux scolaire de la petite Saliha, ses déboires avec les fausses ballerines de gym, puis son mariage forcé ; on suit la vie des trois autres fils, l'un arriviste et arrogant, l'autre un peu simplet qui a vite fait de tomber dans l'escarcelle des vieilles européennes un brin nympho, et le troisième studieux et responsable, et dont la conscience politique s'élève petit à petit, jusqu'à...

Donc : un excellent livre sur l'Egypte, fouillé et foisonnant. On en s'ennuie pas à une seule page, on est totalement projeté dans cette Egypte des années 40.

Résumé de l'éditeur : "En cette fin des années 1940, sous les pales des ventilateurs de l’Automobile Club du Caire, l’Égypte des pachas et des monarques flirte avec aristocrates et diplomates de tout poil, pour peu qu’ils soient européens. Régulièrement, Sa Majesté le roi honore de son éminente présence la table de poker. Extravagance, magnificence et décadence qui s’arrêtent aux portes des salons lambrissés. Dans les communs, une armada de serveurs et d’employés venus de Haute-Égypte et de Nubie s’escriment à satisfaire les exigences de l’inflexible El-Kwo, le chambellan du roi. L’esclave du monarque est aussi le chef suprême des employés de tous les palais royaux, qui régente dans ses moindres détails leur misérable existence et se délecte à professer l’art de la soumission.
Parmi ses “sujets” : Abdelaziz Hamam, descendant d’une puissante famille ruinée, venu au Caire dans l’espoir d’assurer l’éducation de sa progéniture. À suivre les chemins contrastés qu’empruntent ses enfants, on découvre les derniers soubresauts de l’Égypte pré-nassérienne : morgue des classes dominantes, dénuement extrême des laissés-pour-compte, éveil du sentiment nationaliste. De toute part l’édifice se lézarde, et dans le microcosme de l’Automobile Club, où le visage noir charbon d’un domestique ajoute une touche d’élégance au décorum, frémissent les temps futurs et l’explosion révolutionnaire qui va embraser le pays."

--> voir aussi la chronique "Lectures d'Afrique" ou la page "Littérature africaine"...

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