Nous sommes allés voir le très beau film "La terre outragée" qui aborde courageusement et majestueusement l'avant, le pendant et l'après-catastrophe de la centrale nucléaire de Tchernobyl.
Un film de Michale Boganim, avec entre autres Olga Kurylenko, qui commente aussi en voix off en français le récit, et c'est tellement prenant.
Un film de Michale Boganim, avec entre autres Olga Kurylenko, qui commente aussi en voix off en français le récit, et c'est tellement prenant.
26 avril 1986, catastrophe de Tchernobyl - "La radioactivité transforme la nature immédiatement affectée par ce sinistre. Les populations sont évacuées brutalement. Alexeï, condamné au silence par les autorités, préfère disparaître...
Dix ans plus tard. Pripiat, ville fantôme désertée par ses habitants, est devenue un no man’s land, gigantesque Pompéi moderne érigé en un étrange lieu de tourisme… Anya est aujourd’hui guide dans la zone, tandis que Valery y cherche les traces de son père et que Nikolaï, lui, persiste à cultiver son jardin empoisonné... Le temps faisant son œuvre, l’espoir d’une nouvelle vie leur sera-t-il permis ?" (source: Allo Ciné.com).
Que dire ?
Tchernobyl, nous l'avons vécu de loin et nous l'avons subi de près sans le savoir.
En Autriche, au moment de Tchernobyl, une des consignes marquantes pour la population fut entre autres de ne pas s'allonger dans l'herbe.
En France, j'étais à Paris en avril 86 (l'année du diplôme), je ne me souviens surtout que d'une consigne tardive sur les salades que nous ne devions pas manger... car sinon, heureusement/miraculeusement, le nuage "s'était arrêté aux frontières de la France" !. L'accident de Tchernobyl (située à 2500 km de chez nous) n'a été annoncé en France qu'à partir du 28 avril. Trois jours déjà que le nuage, les vents, les pluies avaient pu utiliser pour disséminer des nanoparticules contaminantes jusqu'en Corse... Mais les autorités se taisaient.
Le film "La terre outragée" est la première fiction tournée sur le site de Tchernobyl (la ville de Pripiat est à 3 kms de la centrale : c'est elle qui fut complètement dévastée par la catastrophe).
Pripiat était une ville-modèle avant cela, les familles travaillaient à la centrale, la municipalité offrait le maximum en termes de loisirs, aires de jeux, confort de vie... Et dans quelques jours, le 1er mai 1986, la ville allait même inaugurer un nouveau parc de jeux avec une grande-roue au pied de la statue de Lénine, et concours de poésie pour les enfants...
L'ambiance était festive et détendue. Les jeunes mariés faisaient la fête; le petit Valéry plantait un pommier avec son père; le garde-forestier faisait sa tournée... quand lui fut le premier à se demander pourquoi soudain les militaires investissaient les abords de la centrale et posaient des barrages.
Ensuite, le film nous montre les images des pluies noires, du nuage de fumée au-dessus de la centrale... tandis que les mariés continuent de danser et que la vie suit son fil... sauf que le marié est réquisitionné pour aller soudain en urgence "éteindre un incendie"... La fête continue, mais sa jeune épouse ne le reverra jamais. Quand elle cherche à avoir de ses nouvelles, une infirmière lui dira crûment que son mari a été évacué et que de toutes façons, il constituait un réacteur nucléaire à lui seul tellement il a été irradié...
Anya, la jeune mariée, nous la retrouvons dix ans après, devenue guide touristique pour des visites de la zone de Tchernobyl. Eh oui, la catastrophe a attiré les tours operators qui emmènent groupes d'occidentaux ou autres aux abords de la centrale, au coeur de la ville dévastée et désertée de Pripiat - mais les visites sont encadrées : port d'une tenue, temps limité dans la zone, désinfection etc. 300 $ la journée AR.
Les touristes sont là, et Anya gagne ainsi sa vie en montrant le paysage de sa jeunesse, aujourd'hui figé et sans âme mais pour elle toujours aussi présent. A tel point qu'Anya, comme d'autres ressortissants de la région, ne peuvent quitter "la zone", ils y sont aimantés, envers et contre tout.
De fait, 10 ans auparavant, jeune mariée dansant en plein air sur le lac de la centrale, Anya avait été aux premières loges pour recevoir les pluies noires et se retrouver contaminée. Au fil du récit, nous nous apercevons en effet qu'elle perd ses cheveux sous la douche ou sur l'oreiller... et en fin de film, Anya se coiffe carrément d'une superbe mais invraisemblable perruque blond platine....
Un autre personnage fort du film, c'est le jeune Valery qui avait 9 ans le 26 avril 1986, et pour célébrer ce jour, plantait avec son père un petit pommier au bord de la rivière près de la centrale. Le père de Valery ? un ingénieur de la centrale qui tout de suite prit la mesure du désastre, fit évacuer femme et enfant, s'en fut acheter des parapluies pour protéger la population, mais compte tenu de la chape de plomb informative, ne put faire plus pour alerter ses congénères.
Pourtant, équipé de son compteur geiger, il mesurait avec effarement les taux de radioactivité partout même dans le marché à viande. Mais ne pouvait rien faire. Il disparut alors. On le crut mort au même titre que tout le personnel travaillant à la centrale ces jours-là.
Toutefois, Valéry son fils, se bat tout le long du film pour montrer qu'aucune preuve n'atteste de la mort de son père, alors même que sa mère a fait le deuil de son mari. Au contraire, il sent que celui-ci est en vie. Se retrouveront-ils ? On l'espère. Le moment du film où Valery, qui est moqué par ses copains de classe qui le traitent de "bonhomme brillant" du fait des radiations, lit devant la classe sa rédaction concernant l'accident, son père... est poignant. C'est l'un des plus beaux moments du film.
J'aurais souhaité parler davantage de cette tragédie, de ce film magnifique... mais je tiens à publier ce billet à la date anniversaire du 26 avril.
Les quelques souvenirs ou faits personnels se rapportant à la catastrophe, dans ma vie professionnelle ultérieure, tiennent à peu de choses: à la suite de déplacements en Ukraine, se voir offrir des bouteilles de "champanaskoye"/ vin blanc pétillant, mais datés de 1986, 1987 : les "cuvées Tchernobyl", donc poubelle.
Et en déplacement à Minsk (Biélorussie, pays limitrophe qui "prit" de plein fouet le nuage radioactif...), l'attention portée sur le site du ministère des Affaires étrangères français de ne pas manger de baies ou de champignons, et pourtant nous étions en juin 2008.. 22 ans après la catastrophe. (La population biélorusse n'a certainement pas eu l'information ou les moyens de se passer de cette consommation).
Aujourd'hui, le président ukrainien a remercié les donateurs du monde entier qui participent au financement du remplacement du sarcophage actuel (les fuites montrent dans les alentours des taux de radioactivité 60% supérieurs à la normale). Cela dit, il faudrait au moins 30 ans pour mettre en place le nouveau sarcophage et décontaminer et évacuer le périmètre contaminé au moyen de robots...
Ci-après : un témoignage du groupement Criirad qui s'est opposé à la désinformation occidentale et française sur l'ampleur de la catastrophe jusqu'au fin fond de l'Europe :
"Tchernobyl se trouve en Ukraine, à 130 km au nord de Kiev, à plus de 2000 km de la France, mais la contamination s’étend rapidement. Dès le 26 avril, poussés par des vents d’altitude qui soufflent du sud / sud-est à environ 30 km/h, les panaches contaminés gagnent la Biélorussie et la Pologne. Le 27, ils progressent vers la Finlande et la Suède où des balises de surveillance vont permettre, le 28 avril, de donner l’alerte. À cette date, les vents soufflent de l’est et portent la contamination vers l’Europe centrale. Le territoire français est atteint dès le 29 avril -– une très forte augmentation de la radioactivité de l’air est attestée à Verdun, dans la Meuse et à Marcoule, dans le Gard. Le 1er mai, le «nuage de Tchernobyl» recouvre la Corse et la quasi-totalité de l’hexagone.(...) .Le sentiment de sécurité est renforcé par la publication de cartes météorologiques montrant que la France est protégée par un anticyclone.
(...) aucune recommandation pour éviter de rester sous la pluie ni pour empêcher les enfants de jouer dehors les premiers jours de mai ; aucune restriction sur la commercialisation des aliments critiques (lait frais, fromage frais, légumes à larges feuilles, etc.) provenant des zones les plus touchées." Source : Crrirad
En France, j'étais à Paris en avril 86 (l'année du diplôme), je ne me souviens surtout que d'une consigne tardive sur les salades que nous ne devions pas manger... car sinon, heureusement/miraculeusement, le nuage "s'était arrêté aux frontières de la France" !. L'accident de Tchernobyl (située à 2500 km de chez nous) n'a été annoncé en France qu'à partir du 28 avril. Trois jours déjà que le nuage, les vents, les pluies avaient pu utiliser pour disséminer des nanoparticules contaminantes jusqu'en Corse... Mais les autorités se taisaient.
Le film "La terre outragée" est la première fiction tournée sur le site de Tchernobyl (la ville de Pripiat est à 3 kms de la centrale : c'est elle qui fut complètement dévastée par la catastrophe).
Pripiat était une ville-modèle avant cela, les familles travaillaient à la centrale, la municipalité offrait le maximum en termes de loisirs, aires de jeux, confort de vie... Et dans quelques jours, le 1er mai 1986, la ville allait même inaugurer un nouveau parc de jeux avec une grande-roue au pied de la statue de Lénine, et concours de poésie pour les enfants...
L'ambiance était festive et détendue. Les jeunes mariés faisaient la fête; le petit Valéry plantait un pommier avec son père; le garde-forestier faisait sa tournée... quand lui fut le premier à se demander pourquoi soudain les militaires investissaient les abords de la centrale et posaient des barrages.
Ensuite, le film nous montre les images des pluies noires, du nuage de fumée au-dessus de la centrale... tandis que les mariés continuent de danser et que la vie suit son fil... sauf que le marié est réquisitionné pour aller soudain en urgence "éteindre un incendie"... La fête continue, mais sa jeune épouse ne le reverra jamais. Quand elle cherche à avoir de ses nouvelles, une infirmière lui dira crûment que son mari a été évacué et que de toutes façons, il constituait un réacteur nucléaire à lui seul tellement il a été irradié...
Anya, la jeune mariée, nous la retrouvons dix ans après, devenue guide touristique pour des visites de la zone de Tchernobyl. Eh oui, la catastrophe a attiré les tours operators qui emmènent groupes d'occidentaux ou autres aux abords de la centrale, au coeur de la ville dévastée et désertée de Pripiat - mais les visites sont encadrées : port d'une tenue, temps limité dans la zone, désinfection etc. 300 $ la journée AR.
Les touristes sont là, et Anya gagne ainsi sa vie en montrant le paysage de sa jeunesse, aujourd'hui figé et sans âme mais pour elle toujours aussi présent. A tel point qu'Anya, comme d'autres ressortissants de la région, ne peuvent quitter "la zone", ils y sont aimantés, envers et contre tout.
De fait, 10 ans auparavant, jeune mariée dansant en plein air sur le lac de la centrale, Anya avait été aux premières loges pour recevoir les pluies noires et se retrouver contaminée. Au fil du récit, nous nous apercevons en effet qu'elle perd ses cheveux sous la douche ou sur l'oreiller... et en fin de film, Anya se coiffe carrément d'une superbe mais invraisemblable perruque blond platine....
Un autre personnage fort du film, c'est le jeune Valery qui avait 9 ans le 26 avril 1986, et pour célébrer ce jour, plantait avec son père un petit pommier au bord de la rivière près de la centrale. Le père de Valery ? un ingénieur de la centrale qui tout de suite prit la mesure du désastre, fit évacuer femme et enfant, s'en fut acheter des parapluies pour protéger la population, mais compte tenu de la chape de plomb informative, ne put faire plus pour alerter ses congénères.
Pourtant, équipé de son compteur geiger, il mesurait avec effarement les taux de radioactivité partout même dans le marché à viande. Mais ne pouvait rien faire. Il disparut alors. On le crut mort au même titre que tout le personnel travaillant à la centrale ces jours-là.
Toutefois, Valéry son fils, se bat tout le long du film pour montrer qu'aucune preuve n'atteste de la mort de son père, alors même que sa mère a fait le deuil de son mari. Au contraire, il sent que celui-ci est en vie. Se retrouveront-ils ? On l'espère. Le moment du film où Valery, qui est moqué par ses copains de classe qui le traitent de "bonhomme brillant" du fait des radiations, lit devant la classe sa rédaction concernant l'accident, son père... est poignant. C'est l'un des plus beaux moments du film.
J'aurais souhaité parler davantage de cette tragédie, de ce film magnifique... mais je tiens à publier ce billet à la date anniversaire du 26 avril.
Les quelques souvenirs ou faits personnels se rapportant à la catastrophe, dans ma vie professionnelle ultérieure, tiennent à peu de choses: à la suite de déplacements en Ukraine, se voir offrir des bouteilles de "champanaskoye"/ vin blanc pétillant, mais datés de 1986, 1987 : les "cuvées Tchernobyl", donc poubelle.
Et en déplacement à Minsk (Biélorussie, pays limitrophe qui "prit" de plein fouet le nuage radioactif...), l'attention portée sur le site du ministère des Affaires étrangères français de ne pas manger de baies ou de champignons, et pourtant nous étions en juin 2008.. 22 ans après la catastrophe. (La population biélorusse n'a certainement pas eu l'information ou les moyens de se passer de cette consommation).
Aujourd'hui, le président ukrainien a remercié les donateurs du monde entier qui participent au financement du remplacement du sarcophage actuel (les fuites montrent dans les alentours des taux de radioactivité 60% supérieurs à la normale). Cela dit, il faudrait au moins 30 ans pour mettre en place le nouveau sarcophage et décontaminer et évacuer le périmètre contaminé au moyen de robots...
Ci-après : un témoignage du groupement Criirad qui s'est opposé à la désinformation occidentale et française sur l'ampleur de la catastrophe jusqu'au fin fond de l'Europe :
"Tchernobyl se trouve en Ukraine, à 130 km au nord de Kiev, à plus de 2000 km de la France, mais la contamination s’étend rapidement. Dès le 26 avril, poussés par des vents d’altitude qui soufflent du sud / sud-est à environ 30 km/h, les panaches contaminés gagnent la Biélorussie et la Pologne. Le 27, ils progressent vers la Finlande et la Suède où des balises de surveillance vont permettre, le 28 avril, de donner l’alerte. À cette date, les vents soufflent de l’est et portent la contamination vers l’Europe centrale. Le territoire français est atteint dès le 29 avril -– une très forte augmentation de la radioactivité de l’air est attestée à Verdun, dans la Meuse et à Marcoule, dans le Gard. Le 1er mai, le «nuage de Tchernobyl» recouvre la Corse et la quasi-totalité de l’hexagone.(...) .Le sentiment de sécurité est renforcé par la publication de cartes météorologiques montrant que la France est protégée par un anticyclone.
(...) aucune recommandation pour éviter de rester sous la pluie ni pour empêcher les enfants de jouer dehors les premiers jours de mai ; aucune restriction sur la commercialisation des aliments critiques (lait frais, fromage frais, légumes à larges feuilles, etc.) provenant des zones les plus touchées." Source : Crrirad
Depuis, le monde a été confronté à la catastrophe de Fukushima. Il n'est pas question dans ce billet de remettre en question l'énergie nucléaire sinon de prôner un contrôle international des installations obsolètes et dangereuses " à la Tchernobyl", et pour une information honnête des populations.